Mars 2024
Edition # 156

La ville de Paris expérimente, en grandeur nature, l'occupation des terrasses planes de ses bâtiments, afin d'aménager de véritables espaces potagers permettant, non seulement, de lutter contre l'effet d'îlot mais également de produire, à une juste mesure, des fruits et légumes consommables, tout en offrant une fonction à des toitures autrefois non valorisées. 

Pari fou mais déjà mis en oeuvre dans de très grandes mégapoles comme New-York ou encore Tokyo, la création de jardins potagers a été porté par la Mairie de Paris et, suite à un concours, la société UrbAgri, spécialisée dans la promotion et le développement d'une agriculture urbaine, a remporté ce challenge. En phase de test pendant 3 années, afin de valider les process et les méthodologies, un premier potager a été implanté sur une toiture d'une annexe de l'hôtel de ville de Paris, dans le 4ème arrondissement, proche de l'avenue de Rivoli et des Quais de Seine.

D''une surface de 1.000 m2, la toiture terrasse de ce bâtiment des années 70, utilisé pour les formations de la Mairie de Paris, a été totalement repensée afin d'accueillir deux espaces de plantation avec un potager articulé en carré hors sol et une centaine de pieds de vigne sur un substrat allégé. Un espace technique, regroupant tables de semis et valorisation des déchets verts complète l'installation. Autrefois non accessible, un calcul de charge mené par le bureau de contrôle SOCOTEC a défini la répartition des charges. Cette toiture terrasse, mise en sécurité pour un usage modéré, disposait d'un revêtement d'étanchéité bitumé.

Afin de mener à bien cette expérimentation, UrbAgri a pris appui sur ses partenaires pour porter ce projet à son terme. La société Siplast, représentée par Eric Laine et Nidaplast, a collaboré dans l'aménagement de l'étanchéité et de la réserve d'eau tandis que le Groupe Loiseleur a formulé et préparé les substrats nécessaires à chaque plantation.

Le complexe d'isolation de la toiture, de bonne facture, réalisée il y moins de 10 années, a été doublé d'une feuille en bitume SBS traitée anti-racine Siplast Parafor Jardin issu de la gamme Silver, disposant d'une garantie de 20 ans. Chaque bande est dotée d'une puce RFID permettant d'identifier et de tracer ce produit dans le temps. La mise en oeuvre a été confiée à la société d'étanchéité Couvertex, réalisée par soudage à l'ancienne étanchéité s'articulant autour d'un complexe bi-couche. (Adepar JS + Paradienne 30.1 GS Siplast.)

La société Nidaplast a fourni des grilles Nidaroof, implantées sur les espaces délimitant le potager et la zone de plantation pour la vigne, afin de créer une nappe phréatique assurant le stockage naturel de l'eau de pluie dans le but d'irriguer les végétaux. Ces plaques en nid d'abeille ont été mises en oeuvre sur un géotextile Geoflow 44-iF afin d'assurer une parfaite étanchéité. Avant la mise en oeuvre des substrats, un feutre géotextile à forte capillarité a été posé sur les grilles Nidaroof. Des trop-pleins, une étanchéité spécifique à la zone de réception, habillé d'un gazon synthétique recouvrant une couche Nidagreen de 28 mm, et tous les points de singularité ont été traités par les sociétés Couvertex et Loiseleur. La zone technique est, quant à elle, recouverte de paillages et résidus de bois issus de travaux d'élagage fournis par l'entreprise Loiseleur.

Ces différentes opérations on été réalisées courant de l'été 2016 et, au 1er septembre, les substrats ont été déposés dans les deux espaces. L'expertise d'UrbAgri a été fondamentale dans leur élaboration afin de répondre aux besoins de chaque plantation. La zone viticole a ainsi reçu un substrat enrichi en compost de marc de raisins, du gravier, du béton concassé, de la brique et du sable. La zone potagère a, quant à elle, été enrichie d'un substrat de champignonnière, associée à un mélange de terre végétale. Les espaces de culture ont été délimités par des planches de coffrage en bois afin de créer des carrés de culture, propre à chaque typologie de légume.

La société Loiseleur a, non seulement fourni les substrats élaborés par UrbAgri, mais également un système d'arrosage automatique, permettant d'apporter la juste et nécessaire quantité d'eau lorsque la nappe phréatique artificielle d'eau de pluie n'est plus suffisante à la bonne pousse des plantes. Rappelons que la solution Nidaplast permet de stocker 100 litres d'eau par m2; une quantité, certes suffisante, au printemps mais avec des conditions climatiques proprse à un espace clos et fortement ensoleillé, un apport complémentaire, pendant les fortes chaleurs reste nécessaire. Dans cette expérimentation, il a été noté que les surplus d'eau de pluie pourraient, à l'avenir, être utilisés pour l'arrosage automatique des plantes évitant, ainsi, tout apport complémentaire d'eau.

Les tous premiers plants de salades, de fraisiers et d'herbes aromatiques ont été mis en place entre le 2 et le 5 septembre. Les 100 pieds de vigne seront mis en oeuvre dès le mois d'avril 2017. UrbAgri, en charge de la gestion du projet et de sa maintenance, a mixé plans potager et fleurs, dans la grande tradition des potagers anciens. Cette pluri-culture assure une protection optimale des plantes tout en évitant l'apport d'entrants chimiques.

Ce test grandeur nature, sur une période de 3 années, doit servir à développer le concept de jardin potager sur toiture, promu par la Mairie de Paris et déployé à très court terme sur du foncier propriété de la mairie. L'objectif, clairement affiché, est de disposer, à l'horizon 2020, de 30 hectares de surfaces agricoles sur Paris et sa très proche couronne. (Les toitures faisant partie de ces surfaces exploitables.)

Avec l'appétit croissant d'une consommation en circuit court et d'un rééquilibrage de la biodiversité au coeur des grandes agglomérations, ce projet a également vocation de mesurer la dimension comestible des aliments produits en zone urbaine pour l'homme. L'aspect végétalisé des toitures en ville est, sans nul doute, un moyen efficace permettant de lutter contre les îlots de chaleur tout en limitant la dégradation de la qualité de l'air. Combinées à une production alimentaire, nos toitures devraient, dans un avenir très proche, soutenir et renforcer cet engagement d'une ville plus agréable où la nature reprend ses droits.

Cet espace et les futurs projets vont démontrer qu'il est possible de transformer une toiture terrasse stérile en un espace nourricier grâce à l'expertise conjointe d'entreprises françaises aptes à répondre durablement aux enjeux de demain.

Notons la présence, sur cette toiture, de 3 ruchers accueillant des abeilles, afin de polliniser les cultures. Un engagement soutenu concrètement par la Mairie de Paris au travers du plan "Ruches et pollinisateurs".